Une éthique ? Quelle éthique ?
Robinson, tant qu'il était seul sur son île n'avait pas besoin d'une éthique. Mais lorsqu'il rencontra Vendredi, il fut contraint d'en adopter une. Ce fut celle de l'Angleterre de son temps. Alors il fit de Vendredi son domestique. Si cette histoire avait eu pour auteur un de nos contemporains, elle eut été écrite différemment. L'homme primitif aurait enseigné au blanc sophistiqué comment se débrouiller dans la nature. Peut-être même se seraient-ils engagés dans des relations homo-
sexuelles : ç'aurait été davantage, encore, politiquement correct.
Quelle est la source de l'éthique ? Longtemps, ce fut Dieu. Plus précisément, un de ses porte-parole, un individu
auto-proclamé prophète, et suffisamment charismatique pour être cru. A partir du XVIIème siècle, le monde entier était connu, ou presque, et on réalisa qu'il existait plusieurs éthiques, qui, souvent, se contredisaient , alors un théologien-
diplomate hollandais, De Groote, ou Grotius, trouva que cela faisait désordre, et décida qu'il devait y avoir une éthique universelle, comme il y a des lois physiques, qu'il fallait découvrir, bref, ce fut le Droit naturel. L'idée plut, et inspira les philosophes "écossais", et Spinoza.Mais la recherche d'une éthique valable erga omnes n'aboutit à rien, et l'on retmba dans la métaphysique : ce qu'on enseigne comme "droit naturel" n'est pas moins arbitraire et subjectif que toutes les autres éthiques nées de l'imagination fertile des moralistes, et ramène, en définitive, à la volonté divine.
De nos jours, le thème du Bien et du Mal est omniprésent dans le cinéma et la littérature (pour la jeunesse ?), probablement sous l'influence de Tolkien. Mais l'origine du concept se trouve chez le réformateur religieux Zoroastre (Zarathoustra). Lorsque les Achéménides s'emparèrent de tout le Proche Orient, le mazdéisme resta la religion nationale perse, mais l'idéo-
logie du Bien et du Mal absolus s'étendit à tout l'empire. On notera qu'elle était étrangère à la Bible. Le serpent de la Genèse n'est pas Satan, nonobstant les représentations qu'en firent les peintres du Moyen Age. Ce qu'on exigeait des Hébreux, ce n'était pas le respect du Bien, mais l'obéissance inconditionnelle à Dieu, ce qui est tout autre chose. Le concept pose un problème insoluble à une religion strictement monothéiste, (celle prêchée par Zoroastre était dualiste ), et il est abordé dans le Livre de Job (dont le chapitre final n'est manifestement pas de l'auteur, mais des scribes du Temple) : si Satan est dans une position subordonnée à Dieu, n'est-ce pas Dieu qui est à la source du Mal ? L'idée de Zoroastre, aussi séduisante fut-elle, se révéla particulièrement néfaste. Il suffit, en effet, de tenir ses ennemis pour les serviteurs du Mal,et le massacre peut commencer. Ce fut, entre autres, celui des Protestants à la St Barthélémy, celui des koulaks, la Shoah des Juifs, le génocide des Tutsis, la liste n'est pas exhaustive, et n'est certes pas terminée.
En fait, aucune société ne saurait être viable sans une éthique. C'est elle qui régente aussi bien les rapports des membres de la société entre eux, que ceux avec les autres sociétés. C'est pourquoi toute société engendre sa propre éthique, celle qui paraît lui convenir le mieux, compte tenu de l'état d'avancement de sa civilisation matérielle. Ce qui revient à dire que non seulement les éthiques diffèrent dans l'espace, mais, également, dans le temps. Et lorsque l'Histoire s'accélère, on peut constater un bouleversement stupéfiant des "valeurs", comme celui auquel nous assistons dans la société occidentale depuis un demi-siècle. Mais si une société élabore l'éthique qui paraît lui convenir le mieux, cela ne signifie pas qu'elle ne peut se tromper. Cela arrive, même, assez fréquemment, et plus l'erreur est lourde, plus les conséquences en sont tragiques. Le nazisme et le communisme en sont de fort bons exemples. Enfin, question primordiale, toutes les éthiques se valent-elles, comme le soutiennent les partisans d'un relativisme absolu, ce qui les amène, sur le plan pratique, à rejeter tout interven-
tionnisme ? Bien sûr que non. Si toute éthique est le reflet, sur le plan idéologique, de l'évolution d'une société dans les domaines économiques, scientifiques, technologiques _ ce qui , disons-le en passant, que ce n'est pas à la science à se conformer à une éthique (laquelle ? fondée sur quoi ? ), mais, à l'inverse, à l'éthique à trouver son inspiration dans le progrès scientifique _, il en ressort clairement que c'est l'éthique de la société matériellement la plus avancée _ la nôtre..._qui doit s'imposer aux autres sociétés, ou tout au moins, constituer le modèle à imiter,lorsqu'elles en seront capables...
Marcus Harmelin Septembre 2011.
Robinson, tant qu'il était seul sur son île n'avait pas besoin d'une éthique. Mais lorsqu'il rencontra Vendredi, il fut contraint d'en adopter une. Ce fut celle de l'Angleterre de son temps. Alors il fit de Vendredi son domestique. Si cette histoire avait eu pour auteur un de nos contemporains, elle eut été écrite différemment. L'homme primitif aurait enseigné au blanc sophistiqué comment se débrouiller dans la nature. Peut-être même se seraient-ils engagés dans des relations homo-
sexuelles : ç'aurait été davantage, encore, politiquement correct.
Quelle est la source de l'éthique ? Longtemps, ce fut Dieu. Plus précisément, un de ses porte-parole, un individu
auto-proclamé prophète, et suffisamment charismatique pour être cru. A partir du XVIIème siècle, le monde entier était connu, ou presque, et on réalisa qu'il existait plusieurs éthiques, qui, souvent, se contredisaient , alors un théologien-
diplomate hollandais, De Groote, ou Grotius, trouva que cela faisait désordre, et décida qu'il devait y avoir une éthique universelle, comme il y a des lois physiques, qu'il fallait découvrir, bref, ce fut le Droit naturel. L'idée plut, et inspira les philosophes "écossais", et Spinoza.Mais la recherche d'une éthique valable erga omnes n'aboutit à rien, et l'on retmba dans la métaphysique : ce qu'on enseigne comme "droit naturel" n'est pas moins arbitraire et subjectif que toutes les autres éthiques nées de l'imagination fertile des moralistes, et ramène, en définitive, à la volonté divine.
De nos jours, le thème du Bien et du Mal est omniprésent dans le cinéma et la littérature (pour la jeunesse ?), probablement sous l'influence de Tolkien. Mais l'origine du concept se trouve chez le réformateur religieux Zoroastre (Zarathoustra). Lorsque les Achéménides s'emparèrent de tout le Proche Orient, le mazdéisme resta la religion nationale perse, mais l'idéo-
logie du Bien et du Mal absolus s'étendit à tout l'empire. On notera qu'elle était étrangère à la Bible. Le serpent de la Genèse n'est pas Satan, nonobstant les représentations qu'en firent les peintres du Moyen Age. Ce qu'on exigeait des Hébreux, ce n'était pas le respect du Bien, mais l'obéissance inconditionnelle à Dieu, ce qui est tout autre chose. Le concept pose un problème insoluble à une religion strictement monothéiste, (celle prêchée par Zoroastre était dualiste ), et il est abordé dans le Livre de Job (dont le chapitre final n'est manifestement pas de l'auteur, mais des scribes du Temple) : si Satan est dans une position subordonnée à Dieu, n'est-ce pas Dieu qui est à la source du Mal ? L'idée de Zoroastre, aussi séduisante fut-elle, se révéla particulièrement néfaste. Il suffit, en effet, de tenir ses ennemis pour les serviteurs du Mal,et le massacre peut commencer. Ce fut, entre autres, celui des Protestants à la St Barthélémy, celui des koulaks, la Shoah des Juifs, le génocide des Tutsis, la liste n'est pas exhaustive, et n'est certes pas terminée.
En fait, aucune société ne saurait être viable sans une éthique. C'est elle qui régente aussi bien les rapports des membres de la société entre eux, que ceux avec les autres sociétés. C'est pourquoi toute société engendre sa propre éthique, celle qui paraît lui convenir le mieux, compte tenu de l'état d'avancement de sa civilisation matérielle. Ce qui revient à dire que non seulement les éthiques diffèrent dans l'espace, mais, également, dans le temps. Et lorsque l'Histoire s'accélère, on peut constater un bouleversement stupéfiant des "valeurs", comme celui auquel nous assistons dans la société occidentale depuis un demi-siècle. Mais si une société élabore l'éthique qui paraît lui convenir le mieux, cela ne signifie pas qu'elle ne peut se tromper. Cela arrive, même, assez fréquemment, et plus l'erreur est lourde, plus les conséquences en sont tragiques. Le nazisme et le communisme en sont de fort bons exemples. Enfin, question primordiale, toutes les éthiques se valent-elles, comme le soutiennent les partisans d'un relativisme absolu, ce qui les amène, sur le plan pratique, à rejeter tout interven-
tionnisme ? Bien sûr que non. Si toute éthique est le reflet, sur le plan idéologique, de l'évolution d'une société dans les domaines économiques, scientifiques, technologiques _ ce qui , disons-le en passant, que ce n'est pas à la science à se conformer à une éthique (laquelle ? fondée sur quoi ? ), mais, à l'inverse, à l'éthique à trouver son inspiration dans le progrès scientifique _, il en ressort clairement que c'est l'éthique de la société matériellement la plus avancée _ la nôtre..._qui doit s'imposer aux autres sociétés, ou tout au moins, constituer le modèle à imiter,lorsqu'elles en seront capables...
Marcus Harmelin Septembre 2011.